CARTOUCHE DE DEMARRAGE MXU pour GTR J57

Par Gilbert Béziat, "pistard" en ERV

Le turboréacteur PWA J57.P.59W qui équipait le C135F de l’armée française était construit par Pratt et Whitney.
Il avait une poussée initiale à sec de 5,080 tonnes et pouvait atteindre 5,863 tonnes avec « injection d’eau ».
Le démarrage des 4 réacteurs du C135F pouvait être assisté ou autonome.
En assistance extérieure, un groupe à air envoyait de l’air sous pression sur chaque démarreur qui entraînait lui-même le compresseur HP du réacteur pour sa phase de démarrage jusqu’à 51%.
Chaque réacteur était alimenté via le poste de pilotage d’où l’on actionnait à tour de rôle le contacteur de mise en route du démarreur.

En autonome, le démarreur du GTR 4 pouvait être alimenté par une « cartouche de démarrage ». Conditionné sous vide dans des boites en alu, c’était un pain cylindrique de « propergol » solide, qui était introduit dans un « bol », lui-même fixé et « clipsé » sur le démarreur du GTR4.
Alimenté électriquement depuis la cabine, la cartouche était mise à feu pour entrainer le démarreur et par la suite les ailettes du moteur.
Une fois démarré, le GTR 4 était poussé à sa puissance maxi admissible, ce qui permettait par prélèvement d’air le démarrage en simultané des 3 autres moteurs.

Ce jour là, lors de la mise à feu de la cartouche, une grande explosion se produisit. Le bol se désolidarisa de son support et tel un missile propulsé par sa charge de poudre, il traversa le capot moteur, ricocha sur le béton du tarmac, effleura le GTR 3, se faufila sous le fuselage et finit sa course sans autre dommage, dans la « verte » après le GTR 1.
L’incident fut si rapide et si soudain que le crew-chief et le préposé à l’extincteur en restèrent médusés.
Un léger début d’incendie fut circonscrit sur le GTR4, pendant que l’équipage coupait les manettes et que sortant de toute part accouraient pilotes et mécanos.
On ne put que constater les dégâts, passer l’avion indisponible et commencer une enquête d’urgence.

Malgré des répétitions successives, il fut écarté le fait que le bol eut mal été mis en place. Tout d’abord à cause de son système de verrouillage qui bloquait une pine dans un orifice avec un « clic » bien particulier, mais aussi parce que la procédure voulait que lorsque le crew-chief avait positionné son bol, le pilote au cours de la check liste s’assurait lui-même de la solidité de l’ensemble.

Une expertise du bol et de la cartouche (du moins ce qu’il en restait), incriminés fut diligentée. Tout le lot de cartouches portant le même numéro fut sorti du circuit pour examen et des tas d’essais furent programmés par les services compétents.
Il va de soi, que dès lors, tous les démarrages cartouches furent l’objet de soins plus que particuliers et les mesures de sécurité renforcées.

Les expertises et les simulations qui durèrent des mois ne permirent jamais de déterminer, à ma connaissance, la cause exacte de cette anomalie qui fut sans doute un cas d’espèce.
Jamais plus durant le reste de ma carrière et celle des J57.PW59, un tel évènement ne fut reproduit, si ce n’est quelques « long feu » sans gravité.

Plus de peur que de mal, un GTR à changer et beaucoup de chance, voilà le résultat de l’affaire !!