Comment les FAS portèrent secours à PEN DUICK VI.

(Jean-Michel GUILLEUX )

Eric Tabarly et le Le Pen Duick VI.


Un jour d’octobre 1973, à l’E.R.V 4/94, tombe des téléscripteurs un ordre extraordinaire de l’Etat-major des FAS : transporter, à RIO DE JANEIRO, un mât de rechange pour PEN DUICK VI, sans perdre de temps.

Quant aux détails de l’opération, pour une fois, il n’y en a pas ….Et vogue la galère ! Un peu de liberté ça n’est pas pour déplaire !
      Les opérations de l’escadron désignent deux équipages et une équipe technique sous l’autorité du Capitaine SCHWENCK. Nous y ajoutons ce qu’il faut pour durer ; provisions, lits picot, etc.…Qui donc disait qu’il ne faut jamais s’embarquer sans biscuits ?

      Le 11 octobre 1973 dans la soirée, nous nous mettons en place au Bourget. L’escale nous annonce qu’il faut attendre jusqu’au lendemain pour embarquer quelques « spécialistes ». Le 12 octobre donc, arrivent successivement : Un ingénieur de la D.C.N et une équipe technique de l’arsenal de BREST, -Gérard PETITPAS, patron de l’équipe TABARLY, quelques personnes difficiles à identifier. Il faudra trier !...ainsi que beaucoup de matériel technique et de l’avitaillement .
      L’ingénieur nous explique que le programme important de travaux qui devait être entrepris au CAP est reporté à RIO. En particulier la barre franche, installée sur demande de TABARLY, ne convenant pas pour un bateau aussi grand que PEN DUICK VI, doit être changée.

      Nous embarquons tout ce qui nous semble indispensable, pataugeant quelque temps dans la confiture coulant d’un pot cassé, et, en route pour GENEVE.
      Le mât est là. Il ne pèse que 5OO KG environ mais il mesure 25 mètres et les verrues de l’accastillage en augmentent beaucoup le diamètre. Le doute nous assaille .Pourrons-nous le glisser dans le cargo ? Essayons !
Nos craintes étaient bien justifiées. Malgré le démontage de la cloison du fond du cargo et à cause de la forme générale de celui-ci, le mât reste coincé dans la porte. Il reste 1 m 3O dehors !
      Nous le ressortons et faisons remarquer au fabricant que la mission est impossible, à moins qu’il ne le scie. Il refuse, hésite, prend l’avis de son bureau d’études et décide enfin de couper son mât. Ce n’est pas de gaîté de cœur…On le comprend. Le mât sera coupé du côté du pied, là où les efforts subis sont surtout en compression. Le fabricant décide aussi de remettre son usine en route pour confectionner, pendant la nuit, un manchon pour enserrer les deux parties du mât.



Le mât à l'embarquement à Genéve.


Le 13 octobre au matin, le manchon arrive et le mât est scié. L’embarquement devient aisé, et en route pour RIO via DAKAR, escale technique obligatoire , les caractéristiques de COINTRIN et de son environnement montagneux faisant mauvais ménage avec les performances du C 135 F .
Rien à signaler lors des deux étapes ; l’avion tourne comme une horloge et nous arrivons dans la nuit à RIO. Un représentant de l’ambassade de France nous informe que PEN DUICK VI n’est toujours pas signalé. Rendez-vous donc, le jour venu, après quelques heures de repos.
      Le lendemain,nous essayons d’entrer sur la partie militaire du terrain .Ce n’est pas simple car tout est bouclé et les gens que nous rencontrons semblent être à l’image du régime politique qui règne sur le BRESIL. Enfin nous arrivons à pied d’œuvre. Une équipe de l’arsenal débarque tout ce qui était dans l’avion.

  Le soir déjà est là quand nous sommes invités à nous rendre au Yacht club de RIO .Eric TABARLY est arrivé. Nous échangeons quelques mots avec lui. A cette occasion je retrouve Olivier de KERSAUSON devenu célèbre depuis. C’est un camarade de classe de l’un de mes frères.
      Notre livraison étant effectuée, nous décollons vers DAKAR le 15 octobre ; au passage, nous admirons rapidement l’extraordinaire baie de RIO DE JANEIRO. Ensuite DAKAR-AVORD avec notre brave C 135 F qui n’a jamais renâclé.
      C’EST FINI, avec le plaisir d’avoir servi à … autre chose !

NOTA : Ce n’est que plus tard que l’on comprit la cause du démâtage de PEN DUICK. L’embase du mât reposant sur le pont qui, ne supportant pas les efforts verticaux qu’il recevait, s’affaissa légèrement mais suffisamment pour déséquilibrer les haubans. Dans ces conditions, le mât ne pouvait que se briser.
Mais il n’était pas directement en cause !!!!