Une mission de ravitaillement mouvementée ...
par Pierre NIGAY.
Par un bel après-midi d'automne comme en connait le sud,nous sommes sur les axes de ravitaillement 05/06 et nous prétons à l'entrainement des MIII B du CIFAS de Bordeaux,ces biplaces qui portent sur le nez une perche de ravitaillement fictive.C'est un travail facile:nous on tourne en maintenant cap et niveau et eux font des contacts secs.Pour finir la mission,sont prévus 2 MIV en rendez-vous sur point et je me prépare à modifier ma trajectoire pour être à l'heure pour honorer le premier rendez-vous.
La lampe du Selcall s'allume.HF2.C'est le Mérou,encore nommé la Méduse,surnom que les équipages donnent au COFAS de Taverny,à cause sa manie de vivre dans un trou!Le Chef de Quart nous ordonne de contacter notre salle d'OPS,soit Mont de Marsan.
UHF2.Un trafic est en cours ,le MIV qui doit rejoindre le premier propose son créneau et sa livrai-son à un autre MIV qui ne sait pas encore s'il va la prendre. Puis une autorité prend le micro et poursuit,devinons-nous,une liste de contrôle où il question d'un train d'atterrissage de MIV qui refuse de se verrouiller avec obstination.Je le rentre,le ressort,il ne se vérouille pas et je recom-
mance.Plusieurs fois de suite.Ça me rappelle cette mésaventure arrivée à un pilote du GOM de Atar en Mauritanie qui convoyait un MD315R à Bouaké , en Côte d'Ivoire.Accueilli par un orage ,il fait une première tentative qui échoue et rentre le train,en tente une deuxième à contre-piste avec le même résultat puis une troisième et pose l'avion sur le ventre:personnel indemne ,avion réformé,
attribution de points négatifs,mais la perte d'un MD315R n'a jamais fait pleurer les équipages! Bi-moteurs au décollage,bon monomoteur à l'atterrissage,les moteurs Renault sont trop fragiles à cause de la lubrification.
Pendant ce temps,nos amis ont fini par admettre l'inutilité de leurs efforts et l'Autorité ordonne à l'équipage d'aller s'éjecter à Captieux. Refus énergique du nav qui a déjà des vertèbres tassées et ne souhaite pas renouveler l'aventure,il veut se poser.Son pilote ne sait pas.L'Autorité ne sait pas non plus,hésite,perd pied,recule puis finit par leur dire de faire comme ils veulent.Notre ORV a alors une réflexion qui sonne juste,bien que le trait soit un peu appuyé.
-"Ce gars-là postule pour une place de laveur de cage au chenil!"C'est alors que le pilote se décide et dit qu'il va poser son avion mais qu'il lui faut ravitailler avant.Enfin,ça va bouger!
L'Approche se charge du rendez-vous.UHF1 : "Descendez immédiatement au niveau 100".
Sans problème,on va même en profiter pour se faire un petit plaisir : un long coup de sonnette, les manettes reculent, le nez monte,la vitesse chute, l'avion passe sur la tranche, le nez plonge, les ailes reviennent horizontales, le train sort, les aéro-freins règlent la vitesse à 10KT du trait rouge de la VNE, nous plongeons vario bloqué à 7000Ft/mn.Belle machine, surtout quand on sait qu'elle remontera ensuite, nez au ciel avec le même vario ,les vibrations en moins. Lourd,vous avez dit lourd?
Mille pieds du palier,voici déjà le niveau 100. Le MIV arrive, notre ORV n'a que le temps de courir derrière et sortir sa ferraille,il est en perche.
"Clair observation"Il entre dans le panier,retombe,annonce "Lampe 30 secondes de vol allumées",rentre à nouveau, "Transfert",ça y est,ça coule!2 éjections évitées le même jour, pas croyable! Transfert terminé, le MIV s'éloigne et va tenter sa chance à quitte ou double sur la piste de Mont de Marsan. Atterrissage réussi,un mécano annonce que le train n'était pas vérouillé. Piste fermée, pétrole un peu court, la sagesse nous fait nous dérouter sur Istres.
De retour à la nuit tombée, la Base se repose, l'OSO est ouvert et nos rescapés nous attendent avec le champagne. La vie est facile entre gens de bonne compagnie.
Le numéro du BSV qui relate l'incident en fait des tonnes pour cacher le caca du chat sous le tapis et on frôle l'attribution de points positifs!L"OSV C135 réussit à glisser in finé une phrase où est reconnue "le parfait professionalisme de l'équipage C135".C'est comme les gosses quand tu leur offre des bonbons,le plus dur c'est de leur faire dire merci!